31 mars 2017

Débutant sans fin






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Exposition personnelle
à Nantes, en mai
galerie Olivier Meyer
Association Les mots et les choses

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CCP 04-016



Viennent de paraitre deux critiques
dans le Cahier Critique de Poésie, fin mars 2017
J'en suis ravi.
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Critique du numéro 5 et 6 de la revue PLI
par Yves Boudier


" D’un format classique et d’une esthétique volontairement sobre, cette revue est le fruit du travail de l’association Pli (soutenue par la région Pays-de-la-Loire). Elle accueille une vingtaine de contributeurs, aux écritures diversifiées, ainsi que des photographies et travaux plastiques. Description fort classique certes, mais les surprises nous attendent dès l’ouverture du numéro et à la fois l’audace, la liberté du ton d’une réflexion poétique-politique sans souci d’unanimité ou de la moindre concession nous saisissent dans une forte et pertinente continuité avec la livraison précédente (février-mai 2016) qui, elle, ouvrait ce chantier attentif à ce « Quelque chose en train de naître (…) Le monde ou rien (…) dans une société “au bout du rouleau” » dans laquelle « Tout doit être jeté dans le bouleversement passionné de cet ordre finissant. Il [serait] grand temps de repartir à l’assaut du ciel ». Ainsi, sur ce terrain se joue la rencontre excitante d’une parole politique héritière sans fascination d’un situationnisme bien pensé et revisité avec la puissance polymorphe du geste et de l’acte artistique et poétique. Cette articulation qui fut, rappelons-le, la pierre de touche dans le passé de revues comme Change ou Action poétique, revient en force et interroge de nouveau les leurres contemporains qui tentent de nous convaincre que nous serions dans un au-delà de cette problématique essentielle qui lie Histoire et écritures. Et, à rebours de revues contemporaines qui ont choisi formellement de mettre en scène ces lignes de ruptures, ces clivages et ces bouleversements sociaux avec une maquette exubérante et des contenus de lecture se voulant un détournement des codes du capitalisme culturel sans toujours parvenir à s’en détacher, Pli fait le choix d’une forme sans excès et au fond respectueuse des questionnements du lecteur. Les effets éventuellement surprenants, voire violents, produits par les textes et les images elles-mêmes et plus encore par leurs rapprochements parfois inattendus, tant dans les contenus que dans les formes, sont d’autant plus forts que se déroulant dans un espace apparemment apaisé. Ainsi, depuis l’important cahier spécial de vingt-cinq pages consacré aux poèmes de Michele Zaffarano (Todenstrieb), depuis les photographies du Groupe Rembrunir, le travail iconique de Patrick Mosconi (Misère des Baby-boomers) du numéro précédent, nous poursuivons le parcours critique de ce « projectile littéral » avec, par exemple, Jean-Marie Gleize, Liliane Giraudon, Mohamed Ben Mustapha, Luc Bénazet, Julien Blaine, Virginie Lalucq, Esther Salmona, Claude Favre, Jérôme Bertin ou Vannina Maestri, tous dans le sillage de la dernière ligne de la page quatre : « Le Parti Imaginaire sera dès lors la forme d’apparition du prolétariat », que l’on se permettra de transformer en « poétariat ». Le détournement graphique de plusieurs célèbres Gueux (Jacques Callot, 1622) effectué par Erwan Keruzoré confirme ce qui fonde les parti-pris de cette revue fort intéressante, soucieuse assurément de décliner et d’interroger les plis passés et contemporains de notre histoire politico-poétique. "



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Critique d' Extrait des nasses
par Luidgi Magno

" Extrait des nasses est une machine textuelle fonctionnant par fragments. Le centre est partout, le départ à la fois comme délité et réitéré. Tout pourrait commencer par un positionnement dans le champ (« Je ici », p. 19) ou un ancrage au sol (« Je suis gisant », p. 30), suivi par un constat politique fort (« La démocratie n’a plus lieu à nos yeux », p. 26) qui affecte (« Nous sommes affectés par ce que nous percevons », p. 33). Et comme l’instance politique se joue dans le langage et touche la démocratie, « il […] faut aujourd’hui tant bien que mal poursuivre dans l’obscurité plate du langage » (p. 27). La poursuite sera poétique, quand bien même « La poésie a tout raté » (car elle se présente comme « Un grand ensemble qui ne nous concerne pas », p. 36), et que « Le chant est terminé » (p. 60). Extrait des nasses essaie de réinstaller le langage dans la poésie, autrement. Par sabotage de ses logiques (p. 19) ou encore par révision des méthodes (p. 33). À partir de ces coordonnées s’opère le choix de la « fiction épique » (p. 23), de « l’histoire silencieuse de l’humanité » (p. 17) ou de « l’histoire absente de l’humanité courbée » (p. 19). Utilisant le présent (p. 43), cette fiction se bâtit par « Un ensemble de documents » (p. 23) et une méthode qui consiste à « Rassembler les indices reliés » (p. 20). Il s’agit alors de penser la poésie comme « un fonctionnement agraphique » (p. 28), un trouble dans lequel chercher une forme et par lequel poursuivre la poésie tout en refondant ses présupposés esthétiques. Et produire ainsi un « commentaire de notre quotidien » (p. 19), non sans action en perspective commune (« Le commun est ma fiction », p. 53).




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